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Apprendre à déguster le vin : Le guide complet (L'Œil, le Nez, la Bouche)

  • Photo du rédacteur: Cathy de Millésimé
    Cathy de Millésimé
  • 20 nov.
  • 6 min de lecture

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Il y a une citation célèbre qui dit : "Boire est un acte physiologique, déguster est un acte intellectuel."

Beaucoup de gens se sentent intimidés devant un verre de vin. Ils n'osent pas donner leur avis, de peur de dire une bêtise, ou pensent qu'il faut un "don" particulier pour percevoir les arômes de mûre ou de cuir. C'est faux. Déguster n'est pas un don, c'est une méthode. C'est simplement apprendre à prêter attention à ce que vos sens vous racontent.

Sur Millésimé.fr, nous voulons désacraliser ce moment. Une fois que vous maîtriserez les trois étapes immuables (l'Œil, le Nez, la Bouche), vous ne boirez plus jamais votre verre de la même façon.

Voici le guide pas à pas pour analyser un vin comme un pro.


Préambule : Les conditions du succès


Avant même de verser le vin, l'environnement joue un rôle crucial. On ne déguste pas bien dans une cuisine qui sent le poisson frit ou dans une pièce surchauffée.

  1. Le Verre : Oubliez le verre à moutarde ou le gobelet en plastique. Le vin a besoin d'une forme "tulipe" (la base est plus large que le buvant). Cette forme permet de faire tourner le vin pour l'oxygéner, tandis que l'ouverture resserrée concentre les arômes vers votre nez.

  2. L'Ordre : Si vous goûtez plusieurs vins, la règle est simple : du plus léger au plus puissant, du sec au sucré, du plus jeune au plus vieux. Sinon, votre palais sera saturé (fatigué) et vous ne sentirez plus rien.

  3. Le Remplissage : Ne remplissez jamais le verre ! Versez environ un tiers (ou jusqu'à la partie la plus large du verre). Vous avez besoin de l'espace vide pour capturer les parfums.


Étape 1 : L'Œil (L'Analyse Visuelle)


La première étape se fait en silence. Inclinez votre verre à 45° au-dessus d'une surface blanche (une nappe, une feuille de papier) et observez. Le vin vous donne déjà des indices sur son âge et sa texture.


A. La Robe (La couleur)


La couleur du vin évolue drastiquement avec le temps. C'est le meilleur indicateur pour deviner un millésime à l'aveugle.

  • Vins Rouges : Jeunes, ils ont une robe violacée, pourpre ou rubis vif. En vieillissant, ils perdent de la couleur. Ils deviennent grenat, puis tuilés (orange brique) et enfin bruns (acajou) pour les très vieux millésimes.

  • Vins Blancs : C'est l'inverse ! Jeunes, ils sont presque transparents avec des reflets verts ou jaune pâle. En vieillissant, ils foncent vers l'or, l'ambre, voire le cuivre pour les liquoreux.


B. L'Intensité et la Limpidité


Regardez le vin de haut. Est-il transparent ou opaque ?

  • Indice de cépage : Un vin très clair (on voit ses doigts à travers) est souvent un Pinot Noir ou un Grenache. Un vin noir et opaque trahit souvent une Syrah, un Cabernet Sauvignon ou un Malbec.

  • Indice de défaut : Si le vin est trouble (voilé), méfiance. Cela peut être un vin non filtré (ce qui est un choix, notamment dans les vins nature), mais cela peut aussi signaler une altération bactérienne.


C. Les Larmes (ou Jambes)


Faites tourner le vin dans le verre. Des gouttes redescendent lentement le long de la paroi : ce sont les larmes.

  • Le mythe : "Plus il y a de larmes, meilleur est le vin". C'est faux.

  • La réalité : Les larmes indiquent la richesse en alcool (l'effet Marangoni) et en sucre. Des larmes épaisses et lentes annoncent un vin puissant, solaire (venant du Sud) ou liquoreux. Un vin très fluide sans larmes sera souvent léger et vif.


Étape 2 : Le Nez (L'Analyse Olfactive)


C'est l'étape la plus complexe mais la plus gratifiante. Le nez humain peut distinguer des milliers d'odeurs.


A. Le Premier Nez


Sentez le vin sans bouger le verre. Plongez le nez dedans. C'est l'impression immédiate. Est-ce que ça sent quelque chose ?

  • Si l'odeur est faible, on dit que le vin est "fermé" (il a besoin d'air).

  • Si l'odeur est désagréable (carton mouillé, vinaigre, œuf pourri), c'est ici qu'on détecte les défauts majeurs (voir plus bas).


B. Le Deuxième Nez


Maintenant, faites tourner le vin dans votre verre (l'aération). Cela mélange l'oxygène au liquide et libère les molécules aromatiques lourdes. Ressentez. La différence est souvent spectaculaire : le vin "s'ouvre".


C. Les 3 familles d'arômes


Essayez de classer ce que vous sentez :

  1. Arômes Primaires (Le Raisin) : Ils viennent du cépage lui-même.

    • Exemples : Fruits (citron, pomme, fruits rouges, fruits noirs), Fleurs (violette, acacia), Végétal (herbe coupée, poivron vert).

  2. Arômes Secondaires (La Fermentation) : Ils viennent du travail des levures et de la vinification.

    • Exemples : Brioche, beurre frais, yaourt, banane (typique du Beaujolais nouveau), vernis à ongles.

  3. Arômes Tertiaires (L'Élevage et le Temps) : Ce sont les arômes nobles du vieillissement, soit en fût de chêne, soit en bouteille.

    • Exemples : Vanille, pain grillé, café, caramel (fût de chêne). Cuir, gibier, sous-bois, champignon, truffe (vieillissement en bouteille).

Le conseil Millésimé : Ne cherchez pas compliqué. Si ça vous rappelle la confiture de fraise de votre grand-mère, dites "confiture de fraise". Il n'y a pas de mauvaise réponse, car l'odorat est lié à votre propre mémoire.


Étape 3 : La Bouche (L'Analyse Gustative)


Enfin ! Prenez une petite gorgée. Ne l'avalez pas tout de suite. Faites tourner le vin dans votre bouche pour qu'il touche toutes les zones de la langue (le sucré est au bout, l'acidité sur les côtés, l'amertume au fond).

On décompose la sensation en 3 temps :


1. L'Attaque (Les 2 ou 3 premières secondes)


C'est la première impression. Est-elle franche ? Douce ? Agressive ? On juge ici principalement le moelleux. Un vin sec aura une attaque vive. Un vin du sud aura une attaque ronde (due à l'alcool).


2. Le Milieu de Bouche (L'Évolution)


C'est le corps du vin. On analyse ici la texture et l'équilibre.

  • L'Acidité (La colonne vertébrale) : Ça fait saliver sur les côtés de la langue. L'acidité est vitale : sans elle, le vin est "mou" ou lourd. C'est elle qui donne la fraîcheur et le potentiel de garde.

  • Les Tanins (Pour les rouges) : C'est cette sensation d'assèchement sur les gencives et la langue (comme quand on boit du thé trop infusé ou qu'on mange la peau d'un raisin).

    • Bons tanins : On dit qu'ils sont "soyeux", "fondus" ou "veloutés".

    • Mauvais tanins : On dit qu'ils sont "verts", "rêches" ou "astringents".

  • L'Alcool : Si ça chauffe fort dans la gorge, le vin est "capiteux" ou déséquilibré. Si l'alcool est discret, le vin est "digeste".

L'Équilibre parfait : C'est quand aucune composante (sucre, acidité, tanin, alcool) n'écrase les autres.


3. La Finale (La Persistance)


Une fois le vin avalé (ou recraché), combien de temps l'arôme reste-t-il en bouche ? C'est ce qu'on appelle la Caudalie. Une caudalie équivaut à une seconde de persistance aromatique intense.

  • 0 à 3 caudalies : Vin court, simple.

  • 5 à 8 caudalies : Bon vin.

  • Plus de 10/15 caudalies : Vin exceptionnel ou Grand Cru. C'est la marque des très grands vins : ils laissent une trace en mémoire longtemps après avoir quitté le verre.


Le secret des Pros : La Rétro-olfaction


Avez-vous déjà vu des dégustateurs aspirer un peu d'air bruyamment ("grémiller") avec le vin dans la bouche ? Ce n'est pas pour faire du bruit. En aspirant de l'air à travers le vin, on propulse les arômes depuis la bouche vers les fosses nasales (par l'arrière gorge). La bouche ne perçoit que les saveurs (sucré, salé, acide, amer, umami). Tous les arômes de fruits ou d'épices que vous croyez "goûter" sont en réalité sentis par votre nez via la rétro-olfaction. Essayez de boire du vin en vous bouchant le nez : vous ne sentirez que de l'eau acide ou sucrée !


Lexique de survie : Les défauts à repérer


Savoir dire qu'un vin est bon, c'est bien. Savoir dire pourquoi il est mauvais, c'est mieux.

  • Le Vin Bouchonné : L'odeur est inratable. Ça sent le carton mouillé, la cave humide, le chien mouillé. C'est dû à une molécule (le TCA) présente dans le liège. Cela touche environ 3% des bouteilles, même les plus chères. Si ça sent le bouchon, le vin est mort. Faites-le changer.

  • L'Oxydation : Le vin a pris trop d'air. Un vin blanc devient marron et sent la pomme blette, la noix ou le curry. Un rouge sent le bouillon cube (Madère). Si ce n'est pas le style voulu (comme un Vin Jaune du Jura), c'est un défaut.

  • La Réduction : C'est le contraire de l'oxydation (manque d'air). Ça sent l'œuf pourri, le chou, le renfermé.

    • La solution : C'est souvent réversible ! Carafez le vin vigoureusement ou remuez-le dans le verre. Si l'odeur part, c'était juste une réduction passagère (fréquent sur les vins jeunes ou bios).


Conclusion : Faut-il être objectif ?


L'analyse technique décrite ci-dessus permet d'être objectif sur la qualité du vin (est-il équilibré ? a-t-il de la longueur ?). Mais au final, la seule vérité qui compte est subjective : avez-vous pris du plaisir ?

Un vin techniquement parfait peut être ennuyeux ("un vin d'ingénieur"), tandis qu'un petit vin de pays techniquement simple peut vous procurer une émotion immense parce qu'il est partagé avec les bonnes personnes au bon moment. Maintenant que vous savez analyser, n'oubliez jamais de simplement... boire.

 
 
 

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